Pratiquer pour le dharma
Lorsqu’il réalisa l’éveil Zhangzhuo, un disciple du maître zen Shishuang Qingzhu (807-888), composa ce poème :
La claire lumière éclaire silencieusement l’infinité du monde.
Tous les êtres sensibles, le vulgaire comme le sage, sont ma famille.
Lorsque aucune pensée n’apparaît, la réalité tout entière est manifeste.
Dès que les six organes des sens bougent, ils sont recouverts de nuages.
Si l’on tranche les passions, la maladie s’aggrave encore.
Rechercher l’absolu est tout autant erroné.
À se conformer aux circonstances du monde, il n’y a point d’obstacle.
Le nirvâna et le samsâra ne sont que des efflorescences dans l’espace.
(Cité et commenté par Dôgen dans son Shôbôgenzô Kûge)
Le dharma ne peut jamais être saisi par de quelconques considérations. Exercez-vous plutôt au dénuement. Allez directement à l’ultime. Si votre assise est vaste et large, vos attentes, vos conceptions jusqu’à votre compréhension de la méditation deviendront alors comme des efflorescences dans l’espace.
Dans la tradition zen, nous disons : ne pratiquez pas pour vous-même, ne pratiquez pas pour autrui, pratiquez pour le dharma.
Ne pratiquez pas pour vous-même. En vous exerçant à la méditation, vous pouvez aspirer à la paix intérieure. Mais cette aspiration n’est encore qu’une façon d’entretenir avec noblesse l’amour de soi. Tout au plus, vous réaliserez une paix qui sera en adéquation avec vos attentes. Si vous n’y parvenez pas, vous ne serez pas satisfait ; si vous y parvenez, vous le serez. Que l’on puisse perdre ou que l’on puisse gagner, il convient de renoncer même à une telle paix. L’éveil naît lorsqu’on rompt totalement avec ses attentes personnelles.
Ne pratiquez pas pour autrui. Si l’on ne pratique pas pour soi-même, on imagine qu’il faille, à l’inverse, pratiquer pour autrui. Mais une pratique pour autrui permute simplement les références, il ne s’agit pas nécessairement d’un saut radical dans la nudité. L’éveil naît lorsqu’on abandonne complètement ses propres représentations.
Et pourtant vous devez « pratiquez pour ». Ce « pratiquer pour » signifie que l’éveil n’a rien d’un état dans lequel se figer. « Pratiquer pour » désigne ce processus continuel de demeurer instant après instant dans l’ouvert pur et nu. Nous l’expérimentons au cœur même de la méditation. C’est ce maintien-là que nous appelons pratiquer pour le dharma. Sans ce « pour », notre pratique ne serait qu’une congélation de l’esprit.
Pratiquez pour le dharma. Asseyez-vous droit, cessez tout jugement et demeurez simplement dans l’ouverture inconditionnelle. Assis, les sens apaisés, l’esprit sans pensée, vous pourriez croire que vous méditez dans l’inconditionnel. Sans doute s’agit-il d’un état méditatif de tranquillité mais ce n’est pas encore le dévoilement de la claire lumière qui éclaire silencieusement le monde. L’apaisement des sens, le repos du mental, l’absence de cogitations et de ruminations n’est pas l’ouverture mais sa condition. Sachez donc distinguer la lucidité transparente de la simple tranquillité. Parfois même cette quiétude n’est qu’un état de douce torpeur où quelques pensées émergent puis disparaissent comme dans un rêve évanescent. Demandez-vous : est-ce simplement mon esprit ordinaire qui est au repos pour quelques instants ou est-ce vraiment la claire lumière qui m’est révélée ?
Lorsque des pensées, des sensations, des perceptions surgissent, je ne me les approprie pas sous la forme de mes pensées, de mes sensations, de mes perceptions. Je ne les regarde pas non plus comme des pensées, des perceptions, des sensations impersonnelles qui s’agiteraient en moi ou devant moi. Je ne m’identifie pas à mes pensées et pourtant je n’en suis jamais séparé.
Il ne s’agit pas non plus de se concentrer sur un objet ni de fixer l’esprit. Ce n’est pas plus observer l’émergence ou la disparition des pensées ni contempler le jeu du mental. Assis-là, nous ne sommes concentrés sur rien, nous n’observons rien. Demeurer dans l’ouvert ne relève ni d’une technique ni d’un exercice. Sautez par-dessus vos espérances. Alors, les pensées, les perceptions, les sensations seront elles-mêmes comme des joyaux transparents et chatoyants au cœur de la non-dualité. Soudainement, tout sera parfaitement unifié sans plus faire de distinction entre le corps et l’esprit, l’intérieur et l’extérieur, un sujet qui perçoit et un objet qui est perçu.
Atteindre ce point vous paraît toujours impossible. Pourtant, il n’y a jamais eu le moindre obstacle. Il n’y a que vous-même qui, d’instant en instant, vous retenez de pratiquer pour le dharma. D’une manière ou d’une autre, vous négociez, même infimement, avec cette assise. Vous voulez un tant soit peu en profiter ou ne serait-ce que la comprendre, la saisir, la cerner. Ce n’est pas une technique qu’il vous faut, mais un changement radical d’attitude. Permettez-vous de pratiquez pour le dharma et vous serez éveillé sur le champ. Il suffit d’un cœur aimant et confiant.
La claire lumière éclaire silencieusement l’infinité du monde.
Tous les êtres sensibles, le vulgaire comme le sage, sont ma famille.
Lorsque aucune pensée n’apparaît, la réalité tout entière est manifeste.
Dès que les six organes des sens bougent, ils sont recouverts de nuages.
Si l’on tranche les passions, la maladie s’aggrave encore.
Rechercher l’absolu est tout autant erroné.
À se conformer aux circonstances du monde, il n’y a point d’obstacle.
Le nirvâna et le samsâra ne sont que des efflorescences dans l’espace.
(Cité et commenté par Dôgen dans son Shôbôgenzô Kûge)
Le dharma ne peut jamais être saisi par de quelconques considérations. Exercez-vous plutôt au dénuement. Allez directement à l’ultime. Si votre assise est vaste et large, vos attentes, vos conceptions jusqu’à votre compréhension de la méditation deviendront alors comme des efflorescences dans l’espace.
Dans la tradition zen, nous disons : ne pratiquez pas pour vous-même, ne pratiquez pas pour autrui, pratiquez pour le dharma.
Ne pratiquez pas pour vous-même. En vous exerçant à la méditation, vous pouvez aspirer à la paix intérieure. Mais cette aspiration n’est encore qu’une façon d’entretenir avec noblesse l’amour de soi. Tout au plus, vous réaliserez une paix qui sera en adéquation avec vos attentes. Si vous n’y parvenez pas, vous ne serez pas satisfait ; si vous y parvenez, vous le serez. Que l’on puisse perdre ou que l’on puisse gagner, il convient de renoncer même à une telle paix. L’éveil naît lorsqu’on rompt totalement avec ses attentes personnelles.
Ne pratiquez pas pour autrui. Si l’on ne pratique pas pour soi-même, on imagine qu’il faille, à l’inverse, pratiquer pour autrui. Mais une pratique pour autrui permute simplement les références, il ne s’agit pas nécessairement d’un saut radical dans la nudité. L’éveil naît lorsqu’on abandonne complètement ses propres représentations.
Et pourtant vous devez « pratiquez pour ». Ce « pratiquer pour » signifie que l’éveil n’a rien d’un état dans lequel se figer. « Pratiquer pour » désigne ce processus continuel de demeurer instant après instant dans l’ouvert pur et nu. Nous l’expérimentons au cœur même de la méditation. C’est ce maintien-là que nous appelons pratiquer pour le dharma. Sans ce « pour », notre pratique ne serait qu’une congélation de l’esprit.
Pratiquez pour le dharma. Asseyez-vous droit, cessez tout jugement et demeurez simplement dans l’ouverture inconditionnelle. Assis, les sens apaisés, l’esprit sans pensée, vous pourriez croire que vous méditez dans l’inconditionnel. Sans doute s’agit-il d’un état méditatif de tranquillité mais ce n’est pas encore le dévoilement de la claire lumière qui éclaire silencieusement le monde. L’apaisement des sens, le repos du mental, l’absence de cogitations et de ruminations n’est pas l’ouverture mais sa condition. Sachez donc distinguer la lucidité transparente de la simple tranquillité. Parfois même cette quiétude n’est qu’un état de douce torpeur où quelques pensées émergent puis disparaissent comme dans un rêve évanescent. Demandez-vous : est-ce simplement mon esprit ordinaire qui est au repos pour quelques instants ou est-ce vraiment la claire lumière qui m’est révélée ?
Lorsque des pensées, des sensations, des perceptions surgissent, je ne me les approprie pas sous la forme de mes pensées, de mes sensations, de mes perceptions. Je ne les regarde pas non plus comme des pensées, des perceptions, des sensations impersonnelles qui s’agiteraient en moi ou devant moi. Je ne m’identifie pas à mes pensées et pourtant je n’en suis jamais séparé.
Il ne s’agit pas non plus de se concentrer sur un objet ni de fixer l’esprit. Ce n’est pas plus observer l’émergence ou la disparition des pensées ni contempler le jeu du mental. Assis-là, nous ne sommes concentrés sur rien, nous n’observons rien. Demeurer dans l’ouvert ne relève ni d’une technique ni d’un exercice. Sautez par-dessus vos espérances. Alors, les pensées, les perceptions, les sensations seront elles-mêmes comme des joyaux transparents et chatoyants au cœur de la non-dualité. Soudainement, tout sera parfaitement unifié sans plus faire de distinction entre le corps et l’esprit, l’intérieur et l’extérieur, un sujet qui perçoit et un objet qui est perçu.
Atteindre ce point vous paraît toujours impossible. Pourtant, il n’y a jamais eu le moindre obstacle. Il n’y a que vous-même qui, d’instant en instant, vous retenez de pratiquer pour le dharma. D’une manière ou d’une autre, vous négociez, même infimement, avec cette assise. Vous voulez un tant soit peu en profiter ou ne serait-ce que la comprendre, la saisir, la cerner. Ce n’est pas une technique qu’il vous faut, mais un changement radical d’attitude. Permettez-vous de pratiquez pour le dharma et vous serez éveillé sur le champ. Il suffit d’un cœur aimant et confiant.
Imprimer | Articlé publié par Éric Rommeluère le 20 Nov. 08 |
le 20/11/2008
Cuando Zhangzhuo, un discípulo del maestro zen Shishuang Qingzhu (807-888), realizó el despertar, compuso este poema :
La clara luz ilumina silenciosamente el infinito del mundo.
Todos los seres sensibles, el vulgar lo mismo que el sabio, son mi familia.
Cuando ningún pensamiento aparece, la realidad se manifiesta por completo.
Tan pronto como los seis órganos de los sentidos se mueven, se cubren de nubes.
Si se cortan las pasiones, la enfermedad se agrava aún más .
Buscar lo absoluto es igualmente erróneo.
Al ajustarse con las circunstancias del mundo, no hay ningún obstáculo.
El nirvana y el samsara no son más que florecimientos en el espacio.
(Citado y comentado por Dôgen en su Shôbôgenzô Kûge)
El dharma no puede ser atrapado nunca por ninguna consideración. Ejercitaros mas bien en la indigencia. Ir directamente a lo último. Si vuestra sentada es vasta y ancha, desde vuestras concepciones hasta vuestra comprensión de la meditación se convertirán en florecimientos en el espacio.
En la tradición zen decimos : no practiquéis para vosotros mismos, no practiquéis para los otros, practicad para el dharma.
No practiquéis para vosotros mismos. Ejercitándose en la meditación podéis aspirar a la paz interior. Pero esta aspiración no es todavía mas que una manera de mantener noblemente el amor de si. A lo sumo realizaréis una paz que se adecuará con vuestras expectativas. Si no la conseguís no estaréis satisfechos, si la conseguís, lo estaréis. Se pierda o se gane, es conveniente incluso renunciar a una paz como esa. El despertar nace cuando se rompe completamente con las expectativas personales.
No practiquéis para los otros. Si no se practica para si mismo nos imaginamos que es necesario, inversamente, practicar para los otros. Pero una práctica para los otros permuta simplemente las referencias, no se trata necesariamente de un salto radical en la desnudez. El despertar nace cuando se abandonan completamente las propias representaciones.
Y sin embargo debéis “practicar para”. Esta “práctica para” significa que el despertar no tiene nada de un estado en el cual nos inmovilizamos. “Practicar para” designa este proceso continuo de permanecer, instante tras instante, en la apertura pura y desnuda. Lo experimentamos en el centro mismo de la meditación. Es este mantenerse lo que llamamos practicar para el dharma. Sin este “para” nuestra práctica no será más que una congelación del espíritu.
Practicar para el dharma. Sentaros derechos, cesad todo juicio y permanecer simplemente en la apertura incondicional. Sentados, apaciguados los sentidos, la mente sin pensamientos, podríais creer que meditáis en lo incondicional. Se trata sin duda de un estado meditativo de tranquilidad, pero aun no es la revelación de la clara luz que ilumina silenciosamente el mundo. El apaciguamiento de los sentidos, el reposo de la mente, la ausencia de pensamientos y reflexiones, no es la apertura sino su condición. Sabed distinguir pues la trasparente lucidez de la simple tranquilidad. Incluso a veces esta quietud no es mas que un estado de dulce sopor en el que algunos pensamientos surgen, desapareciendo después como en un sueño evanescente. Preguntaros: ¿Es esto mi espíritu ordinario simplemente, que está en reposo, o es verdaderamente la clara luz que me es revelada?
Cuando los pensamientos, las sensaciones, las percepciones surgen, no me las apropio bajo la forma de mis pensamientos, mis sensaciones, mis percepciones. No las miro tampoco como pensamientos, percepciones, sensaciones impersonales que se agitarían en mí o ante de mí. No me identifico con mis pensamientos y sin embargo no estoy nunca separado de ellos.
No se trata tampoco de concentrarse sobre un objeto ni de fijar el espíritu. Tampoco es observar surgir o desaparecer los pensamientos, ni contemplar el juego de lo mental. Sentados aquí, no estamos concentrados sobre nada, no observamos nada. Permanecer en la aperura no tiene que ver con una técnica ni con un ejercicio. Saltad por encima de vuestras esperanzas. Entonces los pensamientos, las percepciones, las sensaciones, serán en si mismas como joyas trasparentes y tornasoladas en el corazón de la no dualidad. Repentinamente todo estará perfectamente unificado, sin hacer ya más distinciones entre el cuerpo y el espíritu, el interior y el exterior, un sujeto que percibe y un objeto que es percibido.
Alcanzar este punto siempre os parece imposible. Sin embargo no ha habido nunca el menor obstáculo. No hay mas que vosotros mismos que, de instante en instante, os retenéis de practicar para el dharma. De una forma u otra negociáis, incluso mínimamente, con esta sentada. Queréis, aunque sea un poco, sacar provecho de ella, o por lo menos comprenderla, agarrarla, cercarla. No es una técnica lo que os hace falta sino un cambio radical de actitud. Permitiros practicar para el dharma y despertaréis inmediatamente. Basta con un corazón amoroso y confiado.
le 20/11/2008
Cuando el discípulo se encuentra ante una dificultad, ante una duda sobre su práctica, el maestro hábil lo percibe, incluso aunque el dicípulos no diga nada, aunque hablen distintas lenguas, incluso aunque el discípulo esté a mil kilometros de distancia.
Reflexionaba yo últimamente sobre zazen, sobre la tecnica a emplear, o a no emplear, aunque fuera esta mínima. No sabía como decirselo (escribirselo) a Eric, pues mi francés, aunque me defiendo (mas o menos) en las traducciones directas, a la hora de la traducción inversa es pésimo. Eric, sin que yo hablará, tal vez sin siquiera saber que me estaba respondiendo, lo ha hecho.
Eric, gracias una vez más.
le 21/11/2008
Cette partie de l'article m'interpelle profondément dans ma pratique, il y a donc encore autre chose derrière la non-pensée .
L'absence de pensée n'est qu'une nécessité pour aller plus loin .
Décidemment le chemin est plein de découvertes joyeuses .
C'est une jolie question... mais a-t-elle une réponse évidente?
Merci Eric de nous faire avancer
Gasshô
Henri