Dans un commentaire hier, Luc me demande comment je vis la douleur en méditation. Que dire ? En fait, la question ne me préoccupe pas beaucoup.

Je n’objective pas la douleur car je n’ai pas appris à méditer de cette façon. Dans cette tradition du zen, on aborde la méditation avec l’esprit vaste. Tout ce qui surgit, un phénomène intérieur (une pensée), un phénomène extérieur (un bruit), est accueilli, intégré dans l’espace méditatif. Rien n’est nié, rien n’est affirmé. L’exercice consiste à être présent à ce qui se présente, les pensées, les sensations, les perceptions, sans rien juger et laisser chaque pensée, chaque sensation, chaque perception à elle-même pour qu’elle se dissolve dans la présence.

J’agis de la même manière avec la douleur et si vraiment une douleur trop vive perturbe ma méditation, soit je persiste, soit j’arrête de méditer. Mais je ne me sens pas contraint par un choix ou un autre. La plupart des personnes ne souffrent pas tant de leurs douleurs que de l’écart douloureux entre leur image de la méditation ("je dois rester assis immobile") et la réalité vivante de leur assise ("j’ai trop mal, je n’en peux plus"). Que l’on reste immobile ou que l’on bouge, chacun devrait apprendre à voir ses propres représentations à l’œuvre et comprendre ce qu’elles donnent à vivre.

On doit tout d’abord apprendre à gérer ses difficultés, qu’elles soient physiques ou mentales, et pourtant la méditation ne commence vraiment que lorsqu’on renonce à gérer sa méditation. Je considère le moine Ryôtan Tokuda comme mon maître-racine. Un jour, il dit : "Oubliez le corps, oubliez la respiration, oubliez le mental et entrez dans le samâdhi." Il ne prônait nullement une inconscience, il conseillait simplement de laisser les pensées, les sensations à elles-mêmes pour faire l’expérience du cœur mis à nu.

 

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