Puisque nous parlons de maître et de disciple, je ne peux que recommander la lecture du très beau livre de George Steiner, Maîtres et disciples (Paris, Gallimard, 2003), où celui-ci explore d'une plume limpide cette relation. Il distingue trois modèles : "le maître détruisant son disciple, le disciple qui trahit ou détrône son maître, l'arc électrique de la foi partagée et de la paternité" (p. 136). Un extrait :

Pour simplifier, on distingue trois grands scénarios, trois structures de relations. Des maîtres ont détruit leurs disciples, sur un plan psychologique et, plus rarement physique. Ils ont brisé leur ardeur, consumé leurs espoirs, exploité leur dépendance et leur individualité. Le domaine de l'âme a ses vampires. En contrepoint, des disciples, des élèves, des apprentis ont subverti, trahi et ruiné leurs maîtres. Là encore, ce drame possède des attributs aussi bien mentaux que physiques. A peine élu recteur, un Wagner triomphant reconduira le Faust moribond, son ancien magister. La troisième catégorie est celle de l'échange, d'un eros fait de confiance réciproque et, en vérité, d'amour (le "disciple aimant" de la Cène). Par un processus d'interaction, d'osmose, le maître apprend de son disciple lors même qu'il enseigne. L'intensité du dialogue engendre l'amitié au sens le plus haut du terme. Il peut engager et la clairvoyance et la déraison de l'amour. Songez à Alcibiade et Socrate, Héloïse et Abélard, Arendt et Heidegger. Il est des disciples qui se sont sentis incapables de survivre à leurs maîtres. (p. 11-12)

Un ouvrage sur les beautés mais aussi sur les embûches et les dangers de cette relation. Quelques pages sont consacrées au zen. C'est un peu philo mais d'une lecture assez accessible.

Le livre est publié en poche depuis peu : Editions Gallimard, Folio Essais, septembre 2006.

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