Le grand silence, un film de Philip Grönig


Ce grand silence est celui des
Chartreux que le réalisateur allemand Philip Grönig a tenté de saisir dans un documentaire quasi muet de deux heures trois-quart. Trop long, trop lent, le film malheureusement (me) déçoit. Bien que le réalisateur ait partagé six mois durant la vie des contemplatifs de la Grande Chartreuse près de Grenoble, celui-ci peine à sonder l’intériorité de ces hommes, laissant le spectateur toujours trop à distance.

Les Chartreux puisent dans une vie de solitude. S’ils vivent en communauté, ils demeurent la plus grande partie du temps dans leur cellule, en fait un pavillon à étage entouré d’un jardinet, priant seul, mangeant seul (on leur apporte leur nourriture), étudiant seul, travaillant seul. Les Chartreux ne font pas vœu de silence à proprement parler, mais ils se taisent la plus grande partie du temps ne communiquant que par des billets échangés entre eux.

Le monastère avait imposé à Philip Grönig un cahier des charges précis, il devait entrer seul au monastère, ne pas utiliser de lumière artificielle, et dans le montage final ne pas ajouter de musique ni de commentaires. Le film était un défi mais ces contraintes, et surtout ce silence que s’imposent ces moines, étaient-ils si puissants qu’ils empêchent d’illuminer la pellicule de cette folie mystique, si précieuse aujourd’hui ? Cette folie scintille ici que trop peu.

Alors que la vie des moines s’articule sur un strict emploi du temps, le réalisateur choisit une narration déstructurée qui ne permet guère de comprendre l’enchaînement des heures. Les Chartreux ne dorment jamais, par exemple, une nuit entière, ils se lèvent à 23 heures 30 pour une prière solitaire puis se réunissent à minuit trente dans l’église pour les matines et les laudes, pour deux à trois heures de prières communes. Si de longs moments sont consacrés à ces prières, parfois à la simple lueur d’une bougie, rien ne permet ici de comprendre où se situe ce moment essentiel de leur vie. Sans ajout aux images brutes, on peine à comprendre le quotidien et l’organisation de la communauté, la séparation par exemple entre les pères qui s’adonnent exclusivement à la prière et les frères en charge des tâches matérielles (la cuisine notamment).

Pour tenter de saisir l’intériorité si impalpable, les plans s’attardent sur un bénitier ou sur la nature changeante. Mais les moines eux ne contemplent ni le bénitier ni la nature. S’ils vivent dans un autre temps, est-ce nécessairement un temps ralenti ? Cet environnement n’est là que pour servir une autre contemplation, l’écoute vibrante de Dieu. Hélas, le film s’étire doucement dans la lenteur jusqu’à l’ennui, ne permettant guère d’entendre pleinement ce Grand Silence.

En salles depuis le 20 décembre 2006. La bande-annonce du film.
 


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