Coïncidence, synchronicité ? David Dubois (La vache cosmique, blog sur le śivaïsme cachemirien), Joy Vriens (Dans le sillage d’Advayavajra, blog sur la Mahāmudrā) et moi-même écrivons en ce moment sur l’interpénétration. En fait, apparemment, nous nous lisons mutuellement et subtilement les billets se font écho. Il s’agit bien d’un cas d’interdépendance ou tout au moins de dépendance : Il y a une relation causale entre l’écriture des billets.

Comprendre l’interdépendance ne fait pas les Éveillés. Les Éveillés se distinguent parce qu’ils perçoivent les relations a-causales (qui ne dépendent pas d’une cause) entre les phénomènes, leur interpénétration mutuelle et simultanée : L’un est tout, tout est un.

Le Traité de la naissance de la foi dans le Grand Véhicule est un livre essentiel, médité par l’ensemble des traditions bouddhistes d’Extrême-Orient, qui explore ces dimensions. On l’attribue au maître bouddhiste indien Aśvaghoṣa (considéré comme le 13e patriarche de la tradition zen), bien qu’il s’agisse en réalité d’un ouvrage composé en Chine au VIe siècle. Le Traité est divisé en deux parties. La première, théorique, s’efforce de comprendre pourquoi nous voyons les choses dans leurs relations causale et temporelle et pourquoi les Éveillés les perçoivent dans leur interpénétration. La seconde est pratique, comment pouvons-nous passer d’un plan à un autre.

Même si sa lecture est difficile, elle reste incontournable car l’ouvrage a influencé tout le bouddhisme d’Extrême-Orient. Nous disposons de deux traductions françaises, celle de Catherine Despeux, Traité de la naissance de la foi dans le Grand Véhicule, publiée chez Fayard dans la collection "Trésors du bouddhisme", et celle de Frédéric Girard, Traité sur l’acte de foi dans le Grand Véhicule, publiée chez Izutsu, un éditeur japonais. Je préfère celle de Frédéric Girard qui dispose d’un appareil critique et explicatif conséquent. Patrick Carré, le directeur de la collection "Trésors du bouddhisme", avait fait le choix de traduire les plus importants textes bouddhistes quasiment sans note explicative, mais parfois je doute de l’accessibilité de ces textes lorsqu’ils sont donnés bruts. L’ouvrage de Frédéric Girard peut être commandé chez Adrien Maisonneuve ou encore chez You-Feng.

Le Traité de la naissance de la foi dans le Grand Véhicule est le tout premier texte chinois où l’on trouve l’expression 無念 munen, "l’absence de conceptualisation", si abondamment utilisée dans le zen avec son synonyme  無心 mushin :

有衆生能觀無念者則爲向佛智
"Les êtres en mesure de contempler la non-pensée progresseront vers le savoir des Éveillés." (Traduction C. Despeux)
"S’il est des êtres qui sont en mesure d’examiner l’absence de conception, ils se dirigent vers le savoir du bouddha." (Traduction F. Girard).

Le texte mérite d’être lu, au moins pour cette phrase, puisqu’elle fonde le zen.




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