Voici quelques jours, j’ai fait une belle rencontre. Une personne que je ne connaissais pas m’avait écrit pour solliciter un entretien. Nous nous sommes donc vus et sans se connaître, d’une manière tout à fait naturelle et simple, nous nous sommes immédiatement engagés à parler du dharma. Quel bonheur que de pouvoir faire fi des discussions et des bavardages pour entrer immédiatement au cœur du sujet. Nous n’avons pas besoin d’être des connaissances ou à fortiori des amis intimes pour cela. Ce genre de rencontre est rare et précieux.

À un moment, Luc (je change le prénom) me fait part de ses interrogations : il pratique la méditation sous la direction d’un enseignant du dharma assez connu et il lui semble maintenant ressentir un hiatus : entre ce qu’il dit et ce qu’il fait. Bigre ! En quelques mots, sa remarque plongeait directement au cœur de la relation du maître et du disciple et des présupposés de cette relation. Par pudeur sans doute, il n’en dit pas plus. Je ne pouvais donc lui donner un conseil, sinon l’inviter à réfléchir. S’il s’agissait d’un escroc ou d’un usurpateur, tout serait plus facile, mais je ne pense pas en l’occurrence que cela soit le cas. Son interrogation soulève un double problème, celui de ses propres attentes et de l’attitude propre de l’enseignant. Évidemment, on idéalise vite le maître, on espère beaucoup de lui, on peut même attendre qu’il soit parfait en tout. Mais la perfection n’est qu’une vue de l’esprit. Le maître reste un être humain qui nécessairement inclut des imperfections. À croire aujourd’hui en la perfection absolue du maître, on s’engage demain à de graves désillusions. La question n’est donc pas « Est-il parfait ? » mais plutôt « Comment vit-il ses imperfections ? » Il convient de ressentir son aspiration et sa sincérité. Si l’aspiration et la sincérité jaillissent sans cesse d’au-delà de lui-même, s’il s'ouvre jour après jour à ses imperfections par cette aspiration et cette sincérité, alors oui,
il mérite sûrement qu’on le suive le plus parfaitement possible.

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