Les bouddhistes parlent souvent du dharma, un mot sanskrit difficilement traduisible qui est souvent laissé tel quel en Occident, mais que l’on pourrait vaguement rendre par « enseignement ». Le dharma est l’un des Trois Trésors ou Trois Joyaux du bouddhisme : le Bouddha (l’Éveillé), le dharma (l’enseignement) et le sangha (la communauté).

Le dharma désigne dans son contexte primitif indien tout à la fois la loi, l’ordre, la condition mais également le devoir et la bonne conduite. Dans une perspective bouddhiste, la signification de ce terme s’infléchit dans une double direction. Tout d’abord, il désigne la condition de l’existence au sens le plus large. On parle des dharma (au pluriel), autrement dit les différents phénomènes physiques ou mentaux expérimentés. La liste la plus commune répertorie cent dharma qui recouvre l’intégralité de ces phénomènes. Mais notre existence est loin de l’abstraction des listes et des répertoires, et l’on pourrait simplement rendre le dharma par « la vie ». L’enseignement du bouddhisme puise dans la vie pour sans cesse y revenir, l’élargir et l’éveiller. Le dharma désigne ainsi, dans les traditions bouddhistes, l’ensemble des enseignements et des méthodes offerts.

Le dharma réunit toujours ces deux sens, la vie et l’enseignement de la vie. Dans cette perspective qui unit la vie et son enseignement, étudier le dharma signifie donc s’étudier soi-même, et toutes les méthodes et les enseignements bouddhistes qui nous invitent à éclaircir l’existence. L’étude du dharma n’est pas l’acquisition d’un savoir mais la transformation de sa propre vie, même si concrètement l’étude passe aussi par l’approfondissement des textes et des écritures.

Le Zen a présenté le dharma d’une manière originale et possède ses propres enseignements qui sont d’une grande richesse. Si aujourd’hui, un étudiant de vie cherche à entrer dans cette tradition, quatre aspects de son enseignement paraissent, tout d’abord, devoir être étudiés. On pourrait en sélectionner d’autres, mais ceux-là sont les plus essentiels, car ils forment les portes d’entrée de cette tradition : il s’agit de l’esprit d’éveil, de la relation maître-disciple, de la méditation et des préceptes. Pour le Zen, c’est par une réelle étude de ces quatre aspects du dharma que l’on entre dans la profondeur de la vie.


L’esprit d’éveil

L’esprit d’éveil, bodhicitta en sanskrit, désigne l’aspiration fondamentale de tout être à la transcendance. Cet esprit qu’il s’agit, selon l’expression usuelle, de « déployer » est au cœur de la pratique. Sans cet esprit, il ne peut y avoir d’étude réelle et vivante.

L’étudiant de vie pourra lire le fameux Bodhicaryâvâtara (« La conduite à l’éveil »), l’hymne vibrant de Shantideva ( VIIIe siècle), qui présente cet esprit dans la forme que lui donne primitivement le bouddhisme indien : comme une double aspiration à l’éveil et au bien de tous les êtres. Ce texte abondamment utilisé dans les traditions tibétaines a été traduit à de nombreuses reprises en anglais et en français, par exemple sous le titre Vivre en héros pour l'éveil aux Éditions du Seuil. Il pourra également consulter le Lam-rim chen-mo (« Le grand livre de la progression vers l’éveil ») de Tsongkhapa (XIVe siècle), un texte fondamental de la tradition Gelugpa qui lui consacre de très longs développements. Une traduction française est parue aux Éditions Dharma.

Les traditions chinoises et japonaises présentent l’esprit d’éveil d’une manière quelque peu différente du bouddhisme tibétain. Dans la tradition Zen, Dôgen (XIIIe siècle) a rédigé plusieurs textes spécifiques : Hotsubodaishin, « Le déploiement de l’esprit d’éveil », Hotsumujôshin, « Le déploiement de l’esprit suprême » et Dôshin, « L’esprit d’éveil », mais ces textes sont un peu difficiles. Plusieurs traductions anglaises ou françaises sont disponibles.


La relation maître-disciple

Dans le Zen, tout comme dans le bouddhisme tibétain, la relation de maître à disciple, si mal comprise encore en Occident, est essentielle. « Sans maître, il est inutile de méditer », disait même Dôgen. Le maître se dévoile sous trois aspects : comme un guide (le maître d’apprentissage), comme un témoin (il démontre que le dharma est vivant) mais surtout comme un éveilleur (il conduit à la conversion du cœur).

Dans la tradition du Zen, il n’existe pas de livre spécifique sur cette relation quoi que Dôgen aborde cette dimension essentielle de l’apprentissage dans son Gakudô yôjin shû, « Le recueil des points à observer dans la pratique de la voie » ainsi que dans le Shôbôgenzô zuimonki, « À l’écoute du Shôbôgenzô » que l’on pourra lire ou relire à l’occasion. Plusieurs traductions anglaises ou françaises sont disponibles.

L’étudiant de vie pourra également lire le Gurupancashika (« Les cinquante stances de dévotion au maître »), un classique du bouddhisme tibétain, traduction d’un texte indien d’Asvaghosha (plusieurs traductions anglaises et françaises) ; ainsi que de Chögyam Trungpa, Le mythe de la liberté, dont le chapitre 7 est consacré à cette relation. Le Zen ne dira pas autre chose que Chögyam Trungpa.

Dans un contexte hors bouddhiste, il pourra également consulter l’excellent Maîtres et disciples de l’écrivain et philosophe George Steiner qui évoque les possibles heurts et bonheurs de cette relation.


La méditation

Le  dharma est l’enseignement de la libération. Dans le Zen, la méditation n’est pas une méthode ou technique, mais une attitude, celle de se tenir déjà dans la libération.

Dans cette tradition, il existe deux grands textes sur la méditation que sont le Fukanzazengi, « Les recommandations universelles pour la méditation assise », de Dôgen et le Zazen yôjin ki, « Le recueil des points à observer dans la méditation assise » de Keizan (XIV siècle). Le premier est court et ramassé, le second plus développé. Il en existe plusieurs traductions anglaises et françaises. La lecture de ces textes est indispensable pour qui pratique la méditation.


Les préceptes

Le dharma recouvre toutes les facettes de l’existence. Son enseignement fait une part essentielle à la question de l’acte et donc à l’éthique (l’éthique n’est rien d’autre que la pensée de l’acte juste). D’une manière générale, cet aspect du bouddhisme est trop peu mis en valeur en Occident.

Toutes les traditions bouddhistes se réfèrent à un jeu de dix préceptes connus sous le nom des dix préceptes de bien. Au Japon, le texte incontournable reste le Jûzen hôgô, « Les sermons sur les dix préceptes de bien », de Jiun sonja (1718-1804). Il n’a pas encore été traduit dans une langue occidentale. Les grands textes sur la morale de la tradition Zen n’ont pas non plus été traduits.

L’étudiant de vie pourra se rattraper en lisant en anglais, The Heart of Being: Moral and Ethical Teaching of Zen Buddhism de Daido Loori (chez Tutlle & Co.).

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