Sandrine Bonnaire filme Sabine Bonnaire. Sabine Bonnaire dit à Sandrine Bonnaire : "T’es pas une salope, t'es ma sœur. T’es pas une pute, t'es ma sœur."

Elle s’appelle Sabine est un film sobre que Sandrine Bonnaire consacre à sa jeune sœur autiste et psychotique aujourd'hui âgée de 38 ans. Depuis quelques années, celle-ci vit dans une maison d’accueil en Charente après un séjour de cinq ans en hôpital psychiatrique. Sandrine Bonnaire tient la caméra et reste silencieuse. Lorsque elle-même interagit avec les personnes qui sont dans le champ de la caméra, les interroge, son ton reste posé, monocorde. C’est à peine si elle consent à apparaître devant la caméra, presque à son corps défendant. Par un dispositif qui sait laisser à distance un amour que l’on pressent total et peut-être fusionnel, le spectateur est convoqué à l’étrangeté et au je-ne-sais-quoi de l’être fou. Car Sabine sait bien qu’elle est Sabine et que sa sœur est bien Sandrine. Et pourtant lorsqu’elle dit "T’es pas une salope, t'es ma sœur. T’es pas une pute, t'es ma sœur", nous ne savons pas ce qu’elle dit, sidérés par le visage de la folie.

Les images s’entrechoquent. Celles, tournées il y a une vingtaine ou une dizaine d’années, d’une adolescente et d’une jeune femme belle aux cheveux longs qui ressemble tant à Sandrine Bonnaire, certes un peu différente, mais qui sait parler, bouger, rire et jouer du piano. Et puis aujourd’hui, celles d’une femme grosse, hébétée, aux gestes malhabiles qui bave et qui tremble. Avec au cœur, une question irrésolue : que s’est-il passé, alors que Sabine a longuement séjourné en hôpital psychiatrique, censé la soigner ou du moins juguler la maladie ? Le film n’est pourtant pas un réquisitoire contre l’institution psychiatrique, simplement la mise en image d’un désarroi devant la dégradation et l’effondrement intérieur d’un être humain. Sandrine Bonnaire cherche des réponses, elle interviewe un thérapeute, la mère d’un jeune homme, infirme moteur cérébral qui vit dans aujourd’hui dans la même institution que Sabine. Même si le thérapeute adopte la posture de celui qui sait, l’un et l’autre témoignent au fond de leur propre désarroi devant cet autre toujours si proche et toujours si lointain.

La bande-annonce de Elle s'appelle Sabine, un beau documentaire de Sandrine Bonnaire (actuellement en salles) :


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